Recits_Contes_Populaires - page 24

Redon se voulait un tenant de cet art profond qu’il pratiqua selon une ouverture
aux créations et aux expériences extérieures et selon un paysage habituel et aimé
où, de même que le géographe Masse, il avait relevé des différences. Celles-ci
correspondent à des partitions traditionnellement entretenues par les Médoquins
entre eux. Les
Ribeirons
vivant dans la
Ribèira
(La « Rivière » : moitié est, fluviale
ou viticole) montraient quelque dédain 10 à l’égard des
Landescàts
de la
Landa
(Lande : partie ouest, tournée vers l’Océan et désormais forestière). En revanche,
les
Landescàts
rejetaient parfois la dénomination Médoc par trop attachée au
renom du vin et donc accaparée par les
Ribeirons,
marqués par les modèles
culturels émanant des grands châteaux maîtres des crus classés. Redon lui-même
— nous l’avons vu plus haut — fait part de cette distinction dans l’esprit des
gens. Le suffixe diminutif en -
escàt,
-
ta,
assimilé par certains Landais comme
un signe d’identification, était également ressenti par beaucoup d’autres comme
dépréciatif et difficilement supportable.' Cela pouvait se traduire par des bagarres
comme celles, quasi rituelles, qui avaient lieu tous les ans pour le conseil de révision
à Castelnau (chef-lieu d’un canton placé à cheval sur la « Lande » et la
« Rivière ») entre
Ribeirons
et
Landescàts,
ou à la fête annuelle de Saint-Raphaël
dans la commune d’Avensan ". Ces deux « Médocs », sensibles au plan même
des familles et des lignées, étaient toutefois reliés par de nombreux échanges
complémentaires. Et s’il est vrai que le reboisement landais a défait l’ancien
équilibre agro-pastoral et ruiné des bergers, il a aussi apporté une aisance et une
ouverture qui, dans les années 1930, alors que le prix du vin baissait, a contribué
à rééquilibrer les impressions de supériorité des petits et moyens propriétaires
viticoles et les attitudes défensives des uns et des autres.
D’autres éléments caractérisent l’intérieur du Médoc. Dans le domaine landais,
une mention doit être faite pour l’étendue nord qui va de Hourtin après l’Ouley
jusqu’à Grayan et que l’on appelle « lède » (
leda
) en raison de la
leda
extérieure 12
touchant la chaîne de dunes côtières et recouverte çà et là de petites hauteurs
de sable nommées
costaus
en occitan. Ses habitants sont les
Ledons.
Il est d’usage,
d’autre part, d’indiquer une subdivision globale pour la partie septentrionale,
baptisée « Bas Médoc » ou « Nord Médoc » maintenant, qui recouvre la
Leda,
que nous venons de citer, et le nord de la
Ribèira.
Nous ajouterons les zones d’appellations viticoles d’une grande importance pour
le Médoc
ribeiron.
L’appellation haut Médoc (décret du 14/11/1936) va de
Blanquefort inclus à Saint-Seurin de Cadourne inclus. A l’intérieur du haut Médoc
apparaissent les crus classés en 1855 et des appellations spéciales portant le nom
de certaines communes. Ce sont Saint-Estèphe, Pauillac, Saint-Julien, Listrac,
Moulis et Margaux. L’appellation Médoc s’étend au nord, à partir de Saint-Yzans
et de Saint-Germain-d’Esteuil. Ces démarcations signifient d’autres « dénivelle­
ments », d’autres rapports d’altérité inégalitaires.
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