1876_II - page 210

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VARIÉTÉS BORDELOISES
fut suivi par
Damai,
quoique ce soit à lui que furent adres­
sées les observations du P.
Fronton Duduc. Damai
aima
mieux les faire imprimer à la fin de son Ouvrage, que de
retoucher les endroits sur lesquels portoit la critique de ce
Savant.
Quoi qu’il en soit des raisons qui le portèrent à en user
ainsi, il est constant que la conjecture de
Thevet
trouvâ aisé­
ment créance en un temps où il étoit plus aisé d’éblouir par
un vain éclat d’érudition, que d’éclairer par une saine criti­
que. Cette opinion fut si bien reçue dans Bordeaux, qu’elle
donna occasion à quelque Versificateur de cette Ville de
mettre au jour les Vers suivans, que
Damait
rapporte dans
ses
Antiquités d'Agen
(fol. 48) :
Gaifre blâme encor sa croyance légère,
Qui aux mauvais avis lui fit ajouter foi ;
S’il n’eût déclaré guerre au Roi Pepin son Maître,
Emu de leur conseil, il ne seroit ainsi
Etendu par la main d’un serf méchant et traître
Dans la fange du Peugue, en un lac obscurci.
Maintenant son tombeau couvert de tromperie,
Sous le nom de Caïphe est encore déguisé.
Il ne faut donc pas être surpris, si des Etrangers, sachant
que c’étoit une opinion généralement reçue dans Bordeaux,
que la tombe de
Caïphas
étoit celle de
Waifre,
l’aient adoptée
aveuglément, dans la persuasion où ils étoient que c’étoit
une tradition du pays constante et bien soutenue. Mais quel­
que grand que soit le nombre des Auteurs qui ont adopté
cette opinion, quelque respectables que soient d’ailleurs les
Savans qui l’ont suivie, ils ne sauraient être d’aucun poids
en faveur d’une opinion qui n’est fondée ni sur la vérité, ni
sur la vraisemblance. Faudra-t-il donc donner dans une extré­
mité opposée, et traiter de
chimere
la tombe de
Caïphas ?
Ce
serait s’écarter de la vérité à l’égard d’un monument dont
l’ancienne existence peut être établie par des preuves incon-
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