1876_I - page 104

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VARIÉTÉS BORDF.LOISES
On ne s’étendra pas davantage sur l’article de cette Tour.
On n’en donnera pas même la description, qu’on trouvera
porter à bord les Pilotes Lamaneurs, et les en ramener. Il y a lieu de
penser que ceux-ci occupoient les maisons que ce Prince avoit fait construire
en ce lieu, pour être plus à portée de donner du secours aux Navires entrans
et sortans. Ces chaloupes étoient donc du nombre de
ces autres choses
qui y
avoient été faites, et sans doute qu’on y avoit pratiqué quelques endroits
pour les y tenir à l’abri.
Quoi qu’il en soit, si le lieu de Cordouan eût été réduit pour lors à l’état
où il est maintenant, et qui ne consiste, suivant M. d’Anville (
Not. des
Gaules,
aux mots
Antros insula),
qu’en un récif..... qui n’occupe qu’environ
vingt toises sur une roche à fleur d’eau ; on le demande, ce lieu eût-il été
propre à la construction des maisons particulières et à être habité ailleurs
que dans la Tour qui y existoit? On laisse cette question à décider à ceux
qui ont une connoissance particulière de ce local.
En attendant, on croit être fondé à assurer que ce lieu appartenoit dans
ce temps-là à la terre ferme, et qu’il en a été détaché depuis par la violence
des tempêtes et l’agitation des flots de la mer, ainsi que la tradition en
subsiste encore dans le Bas-Médoc. Il paroît même qu’à l’époque de la
chartre dont il est ici question, ce lieu étoit déjà entamé.
Per magnas venti
et aqua tempestates
.....
totus idem locus
.....
in viâperditionis existit.
La mer,
par ses efforts continuels, s’est donc enfin pratiquée depuis ce temps-là une
ouverture entre ce rocher actuel et la terre ferme, dont il faisoit alors
partie ; et c’est ainsi que s’est consommée l’entiere destruction dont ce lieu
étoit menacé dès le commencement du quinzième siecle.
Qu’on ne dise pas, qu’aux termes mêmes de cette chartre, la Tour que fit
construire le Prince de Galles étoit placée au milieu de la grande mer,
infrà
magnum mare.
On répond que le mot
infrà
ne doit point être traduit par
celui
au milieu.
Il signifie, à proprement parler,
desous, au-dessous, plus
bas,
etc. Mais peut-on supposer que ce soit en ce sens que ce terme ait été
employé dans cette chartre? Qui est-ce qui s’aviseroit de jetter les fondemens
d’un édifice, même sur un rocher qui seroit au-dessous des eaux de la mer?
L’entreprise ne paroît pas possible. Le mot
infrà
ne peut donc avoir été
employé dans cette chartre, que pour dénoter que cette Tour avoit été cons­
truite dans un local si avancé dans la mer, qu’en certains cas extraordinaires
il pouvoit être couvert par les eaux ; et la chose ne s’est que trop vérifiée,
puisque ce lieu, ainsi que divers autres du Médoc, a été englouti par les
flots, et entièrement détaché de la terre ferme.
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