1876_III - page 53

SAINT-MORILLON
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usage subsistoit encore au temps de Sidoine-Appollinaire, qui
vivoit dans le cinquième siecle.
Sidoine observe encore à son neveu, que ce qui pouvoit
diminuer l’horreur de cet attentat, c’est que les monceaux de
terre qu’on élevoit au-dessus des sépultures, s’étoient affaissés,
soit par le poids des neiges, soit par les courans d’eau formés
par les pluies continuelles qui les avoient fait entièrement dis­
paraître, ensorte que la surface du terrain étoit entièrement
applanie ;
sed tanien tellus
,
humatis qua superducitur, redierat in
pristinam distenta planitiem pondéré nivali, scu diuturno imbrium
fluxu sidentibus acervis
(2).
Voilà la preuve bien claire qu’on élevoit des monceaux de
terre au-dessus des sépultures, afin qu’on ne fût pas assez té­
méraire que de prophaner le local où elles étoient placées.
Ce cérémonial étoit appellé chez les Païens,
injectio gleba.
C’étoit le dernier devoir qu’on rendoit aux défunts, et la der­
nière et la plus importante cérémonie qu’on faisoit sur leurs
tombeaux : « pour ce, dit Claude Guichard, dans son
Traité
»
des Funérailles
(Liv. I, pag. 93), qu’avant que la terre eût
» été jettée dessus le lieu où le corps étoit enseveli (ce lieu)
» n’étoit adstreint à aucune religion, et le trépassé n’étoit
» nullement inhumé, joint que la famille demeurait jus-
» qu’alors funeste et endeuillée, au-lieu qu’après le solemnel
» jettement de terre, le corps étoit justement et sans défaut;
» la famille étoit délivrée, la place étoit bénite et comprenoit
» en soi plusieurs beaux privileges et droits religieux; de sorte
(2)
Ce mot
acervis
donne à entendre qu’on mettoit des monceaux de terre
au-dessus des sépultures, ce qui formoit les élévations dont il est ici ques­
tion ; et c’est ce qui ne se faisoit pas sans dessein. Les anciens regardoient
les tombeaux des défunts comme une chose inviolable; et pour qu’on
n’ignorât pas les endroits où ils étoient placés, et que, sous ce prétexte, on
ne fût pas assez téméraire pour y toucher, ces éminences de terre qu’on
avoit soin d’y former, étoient, de convention faite et généralement connue
de tout le monde, les signaux des sépultures.
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