1876_II - page 285

SAINT-NICOLAS DE GRAVES
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connus dans le Pays Bordelois que sous le nom de
Gaffets
ou
Gahets,
dénomination qui dérive du verbe Gascon
gahar,
qui
signifie s’attraper, s’attacher; sans doute qu’ils étoient atteints
d’une maladie qui se communiquoit aisément ; de là l’espece
d’éloignement et même d’horreur qu’on avoit en général de
ces gens-là, qui étoient séparés du commerce et de la société
d’avec les autres hommes; ils étoient partout l’objet de la
haine publique; ils etoient regardés comme étrangers dans
leur propre pays natal; ils étoient, en quelque sorte, notés
d’infamie, privés des droits communs à tous les hommes,
abhorrés du peuple, suspects aux Citoyens, habituellement
destitués des biens de la fortune, et manquant quelquefois du
nécessaire; ils étoient réduits, pour la plupart, à exercer les
métiers les plus vils ; ils ne pouvoient prendre leur repas
avec les autres habitans, et il leur étoit défendu, par un an­
cien Statut de cette Ville, « d’entrer dans les boucheries, ta-
» vernes, cabarets, paneteries, et participer avec l’autre peu-
» pie, sous peine du fouet, et même de sortir de leurs
» maisons et habitations, et entrer en Ville, sans porter une
» piece de drap rouge, attachée au-devant de la poitrine, et
» sans être chaussés, sous la même peine ».
On comprend aisément que ce n’étoit pas en haine de la
personne de ces
Gahets
qu’on leur faisoit des défenses aussi
sévères; mais uniquement pour préserver les personnes saines
des atteintes de la maladie dont on les croyoit attaqués ; il fal-
loit, sans doute, qu’on en eût fait de tristes expériences,
puisque par tout on usoit, à leur égard, de pareilles précau­
tions. Ce n’étoient donc pas des sentimens d’inhumanité qui
dictoient ces Ordonnances de Police, mais uniquement l’obli­
gation de pourvoir à la santé publique, et d’en éloigner ce
qui étoit capable de lui nuire. Ces hommes infortunés avoient
embrassé, depuis long-temps le Christianisme, aussi étoient-ils
appellés
Chrétiens,
en quelques endroits, au rapport de M. de
Marca, dans son
Histoire du Béarn.
Il semble que, par cette
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